La ligne de crêtes, d’abord assez étroite, mène en terrain dégagé au Pijol de Brosquet (1764m) en passant par le Pijol des Enroucades, le Pijol d’Argentan, le Pijol de Sarrouge : (le terme Pijol que l’on trouve uniquement à cet endroit est probablement une déformation de pujal qui provient de l’occitan pujar : monter). Là, elle s’arrondit et s’incurve légèrement vers le nord ; on pénètre dans la forêt, habitat du pic noir dont on peut entendre le bruit caractéristique de martèlement dès le mois de février ; on trouve d’abord des résineux, avec beaucoup de mélèzes, puis de plus en plus de hêtres et de frênes.
Continuons à descendre doucement jusqu’au village d’Olbier, situé au pied d’un promontoire dont la nature calcaire ne fait aucun doute : les petites falaises sont littéralement truffées de passages et de grottes plus ou moins profondes ; dans deux d’entre elles, se trouvent des fresques, bien abîmées par l’humidité. On devine des croix, un soleil, une épée,… Est-ce comme le dit Déodat Roché une œuvre des Templiers représentant le vase mystique du Graal, qui aurait séjourné dans une crypte de Montségur?
Au sommet de la butte, dont la flore est caractéristique des pelouses sèches calcaires montagnardes (euphorbes, bouillon blanc et même fritillaire des Pyrénées), on peut deviner les ruines de la forteresse de Montréal de Sos, qui faisait partie d’un réseau de forteresses établi par les comtes de Foix au XIIIème siècle, plus pour asseoir leur puissance que pour contrôler militairement le haut Vicdessos. Cet édifice qui était de très grande taille comportait un donjon, des bâtiments annexes et un mur d’enceinte renforcé par des tours. La partie inférieure du promontoire abritait un habitat villageois, qui donnera Olbier.
La région
était sous la tutelle des comtes de Foix, mais ceux-ci par la
charte de
1272, qui sera complétée en 1293, ont
donné une certaine autonomie à la communauté, en établissant un
système de
consulat. Les consuls, élus ou plutôt cooptés chaque année à
la Saint-Jean
par les notables, contrôlaient l’économie, le commerce et réglaient les
conflits entre leurs administrés.
La vie agricole était structurée en de nombreuses petites exploitations consacrées à l’agriculture vivrière : céréales (seigle, avoine, orge et surtout millet) et légumes (haricots, lentilles, pois, fèves). Les forêts et les estives, propriétés seigneuriales mais gérées par les consulats, permettaient un complément de ressources : les paysans y avaient libre droit de « maronage » (coupe de bois de construction), d’ « affouage » (ramassage de bois mort), de pacage, de chasse et de pêche. A partir de 1293, chaque famille a eu également, en plus du libre droit de pacage et de coupe, le droit de posséder un four à pain.
Ces
droits d’usage, immémoriaux, n’ont été abolis ni par la
Révolution ni par
l’Empire ; la
promulgation du Droit Forestier en 1827 qui tente de les réduire
entraînera la
« guerre des demoiselles » : des paysans
déguisés en femmes se
regroupent en bande pour attaquer les représentants de l’Etat et les
grands
propriétaires fonciers. Depuis le Couserans où elle a débutée, la
révolte gagne
le haut Vicdessos (le château de Miglos sera pillé).